On va prendre la parole, on va chercher les mots,
Les mettre dans les oreilles, les mettre dans les mémoires,
Les mettre dans les fusils et puis on va tirer
Des mots comme y'en a plus, des mots jugés ringards
Parc' que ces mots font peur aux tenants du pouvoir,
Aux cyniques, aux blasés ou pire, aux résignés,
Ceux qui ferment leur gueule pour avoir la pâtée.
Des mots qui donnent confiance, des mots qui donnent courage
Des mots qui canalisent la force de notre rage,
Des mots comme des bombes, des mots qui déchiquètent,
Tous les mots langue de bois qui nous traitent comme des bêtes,
Des mots qui mentent pas, des mots qui disent c'qu'ils voient,
Des mots clairs, des mots doux, des mots qui aiment la vie,
Qui cassent les barricades, qui battent la chamade :
Mais avant tout des mots qui refusent la brimade.

(Extrait de Molière XIV - Layla Nabulsi)

Proposer des interrogations et des pistes de réflexion sur la vie en société, participer à faire part des injustices et des aberrations. Aujourd'hui plus que jamais : à l'heure où nous vivons le Casse du siècle dans la résignation et où nous acceptons la féroce disparité des répartitions des ressources naturelles et de l'argent, il me semble urgent de faire entendre d'autres voix. Je pense que le théâtre doit aussi être un lieu de débat, un des derniers bastions où les gens puissent échanger des idées, des points de vue et ne surtout pas être un lieu de consommation comme un autre, ce qui ne semble pas aller dans le sens de l'histoire (à court terme). Le théâtre comme lieu de résistance. L'humanité entière a le cul posé sur la bombe qu'est le changement climatique et la responsabilité des gens qui ont accès à la parole publique est grande parce qu'ils participent à distiller des idées. Cela ne signifie pas qu'il faille assommer les gens avec des considérations sinistres, au contraire, il me semble qu'il faut contribuer à insuffler de la joie et de l'envie de vivre ensemble, à refuser la peur de l'autre, à tenter d'aller au-delà du reflet du monde et du constat amer, à laisser libre cours à l'imaginaire, à participer à l'édification d'autres possibles parce que nous savons presque tous, aujourd'hui, que le monde comme il tourne aujourd'hui court à sa perte. La course à la croissance, le consumérisme à tout crin, c'est fini ou alors, c'est tout le reste qui est vraiment fini. Nous, les habitants temporaires de cette planète, sommes comme Ulysse qui ne résisterait pas aux sirènes ou comme les enfants qui ont suivi le joueur de flûte. Je crois profondément que les artistes sont là pour faire résonner d'autres sons de cloches, pour faire rire (par exemple, des idioties que la plupart des médias et que certains hommes politiques s'obstinent à marteler (genre travailler plus pour gagner plus quand il n'y a pas de travail pour tous et gagner plus que qui ? que le joueur de foot Ronaldo à 1,5 millions d'euros par mois ou « La vente des voitures a encore baissé » ce dont il faudrait se réjouir ou « La croissance est en berne », la croissance reposant sur l'idée qu'il faut produire plus encore que l'année précédente, ce schéma-là n'est plus acceptable dans un monde aux ressources limitées). Donc oui, parce nous avons (encore...) la liberté d'écrire et de contribuer à faire entendre d'autres voix, nous devons nous battre. « En ces jours de ténèbres nous avons une mission : apporter aux vaisseaux qui errent dans le noir la lueur obstinée d'un phare. » (dernière phrase du spectacle « Les naufragés du Fol espoir » du Théâtre du Soleil.

Mise en ligne 06/09/2013

Liste des spectacles créés, représentés et accueillis en Belgique francophone auxquels l'artiste a participé.