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L'écrivain Conrad Detrez (1937-1985) eut une vie mouvementé et riche. Né de père wallon et de mère flamande, ex-séminariste, militant de gauche pour les droits de l'homme, bisexuel, engagé dans la guérilla en Amérique du Sud, emprisonné et torturé, conseiller culturel à l'ambassade de France au Nicaragua, il reçut le prix Renaudot 1978 pour « L'Herbe à brûler ». Ce livre autobiographique a inspiré Frédéric Dussenne pour ce spectacle.
Qui n'a aucune connaissance de Detrez n'en a guère besoin pour entrer dans l'univers baroque, déchaîné, fantastique issu de l'admiration du metteur en scène pour cet homme complexe. Qui, au contraire, est au fait de la biographie et des écrits de cet artiste engagé sera sans doute déçu de ne pas trop s'y retrouver à travers les scènes convulsives de cette réalisation quasiment chorégraphiée où les mots sont rares et les images fortes nombreuses.
Les anecdotes ou les épisodes d'une vie entre 1955 et 68 sont évoqués, entraînés dans l'agitation trépidante, burlesque, débridée du carnaval de Rio. Car c'est bel et bien d'une jubilation charnelle qu'il est ici question, de plaisir à goûter dans l'immédiat, sur fond de violences tant urbaines que politiques. Avec comme exergue final un tag pastichant la phrase célèbre de Viansson-Ponté dans « Le Monde » en mars 68 : L'Europe s'ennuie.
Un charivari libérateur
La radieuse troupe belgo-brésilienne mise en scène par Dussenne s'en donne à cœur et à corps joie. C'est d'abord un remue-ménage tonitruant où la chair exulte. Pimentée de provocations à la Jan Fabre, scandée de musiques aguichantes qui entraînent le mouvement, une sarabande érotique de couples hétéros et homos, voire sado-masos envahit le plateau. Désir et plaisir se conjuguent avec entrain donnant une vision trépidante d'un besoin vital.
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L'aspect baroque délirant de l'ensemble ne fait pas oublier le réel affrontement entre la forte prégnance de la religion catholique et la sensualité latente des individus en ces pays d'Amérique latine.[...]
N'est pas omise non plus l'apparente dichotomie entre jouissance physique et torture sadique, copulation et viol. Car peu sépare le plaisir et la souffrance. Comme peu parvient à dissocier violence terroriste et barbarie institutionnelle. Ce qui s'inscrit dans le tohu-bohu de comédiens-danseurs-chanteurs emmenant vers des images puissantes et colorées, dont certaines ramènent irrésistiblement à Ensor.[...]
Michel Voiturier © www.ruedutheatre.eu
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Entre danse, hurlements et coïts simulés, les huit comédiens partent en flammes pour une fête ininterrompue de plus d’une heure. Intense et créatif. Enfin, la fête pas tout à fait. Si le carnaval est au centre de L’herbe à brûler, l’oeuvre de Conrad Detrez dont Burning est inspiré, l’écrivain y aborde surtout la religion et la politique. Celles qu’il a connues notamment durant son séjour en Amérique du sud. Le carnaval est surtout un prétexte à la folie de l’Homme. Au sexe débridé et à la révolution.
Dussenne a fait passer toute cette substance animale autant qu’intellectuelle à travers les mailles du théâtre pour en garder la quintessence qui se passe très bien des mots. Ce sont plutôt les langues qu’il met en exergue. Sur scène, on en parle au moins quatre et le public n’a pas besoin de les comprendre. Parce que, physiquement, tout est dit.
Un beau travail sur l’expression purement corporelle donc avec Burning. Pour une fois, il suffit de se laisser aller à l’interprétation directe, ce sont les sens qui capteront tout.
Samuel Bury © www.demandezleprogramme.be
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