Je te le dis tout bonnement avec ton ironie qui te met à distance de la violence de la vie et de celle de ta conscience : cette vieille habitude de posséder, c’est ta mort.
Un industriel milanais, père de famille pragmatique et plutôt « centre gauche », fait ce rêve étrange : il se voit enfant, à la poursuite d’un garçon plus grand que lui et dont il ne peut voir le visage. Il l’appelle « Père ».
Il se réveille en sueur et cherche à élucider son rêve. Ce garçon insaisissable serait-il son propre fils ? Il est alors pris d’un violent malaise. Infarctus réel ou rêvé ? Prophétie ou énigme ? Désormais, le Père vivra - parfois jusqu’au ridicule - dans la hantise de résoudre le Mystère du Fils. Mais comme le révèlera le spectre de Sophocle en personne : on ne peut résoudre le mystère. On peut seulement le connaître. C’est-à-dire le toucher, le voir, le sentir…
Poète, romancier, scénariste et cinéaste italien, PIER PAOLO PASOLINI naît en 1922. Il adhère en 1947 au Parti communiste, auquel il restera fidèle jusqu’à sa mort. Son œuvre est indissociable de cet engagement politique. Il sera brutalement assassiné en 1975 sur la plage d’Ostie, près de Rome. Il laisse une œuvre théâtrale d’une incroyable audace qui s’inscrit dans la lignée des grands tragiques grecs. Oedipe Roi raconte le meurtre du père par le fils. Affabulazione, le meurtre du fils par le père. La pièce explore sur le mode tragi-comique la destitution du statut du Père dans la société contemporaine et la difficulté, pour les Fils, de se trouver une place dans un monde sans Histoire. Sujet « grave » que Frédéric Dussenne traite sous la forme d’une rêverie légère. Du mouvement pur à la danse et au music-hall, il ne s’interdit, avec ses acteurs, aucune fantaisie pour donner corps à la langue exceptionnelle de Pasolini.
Frédéric
Alors que les intellectuels de sa génération ont une fâcheuse tendance à pleurnicher sur les échecs de la gauche, Pasolini réaffirme dans chaque geste poétique son amour immodéré pour la réalité. « Cette religion qui n’a d’autre principe que le rose dans lequel naît le soleil et le rose dans lequel il meurt. » Et c’est cet amour de la vie pour elle-même qui lui donne le courage d’envisager qu’après lui, cette génération qui lui semble désengagée et perdue réussira peut-être là où lui et ses pairs ont échoué.
Frédéric Dussenne
UCCLE / BELGIQUE / 03.07.1963 / 18:00
Acteur, metteur en scène et pédagogue. Fonde il y a douze ans L’acteur et l’écrit, compagnie dont le nom résume à lui seul le programme : confronter la pensée à la chair. Pour lui, le texte de théâtre c’est d’abord une organisation rythmique et sonore. Un son organique. Comme une langue internationale à débusquer, un esperanto mystérieux du corps.
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